DERRIKSITECu4
(UO2) (SeO3)2 (OH)6 Musonoi,
(Ouest de Kolwezi), Katanga, R.D. Congo |
Découvert par les minéralogistes
de l’Union Minière du Haut-Katanga, ce minéral est considéré par
les auteurs comme le plus rare de la série des sélénites trouvés
dans la digénite sélénifère de Musonoi. Il a été décrit en 1971
par Fabien Cesbron (CNRS Paris VI), Roland Pierrot (BRGM) et Théodore
Verbeek (Union Minière Exploration, Toronto). Les cristaux se trouvent
dans le gîte de Musonoi, l’un des gisements cupro-cobaltifères du
Katanga. La derriksite est dédiée à Jean-Marie François Joseph DERRIKS (1912-1992) dont le prénom usuel était Joseph. Né à Huy le 8 août 1912, Joseph Derriks décéda à Alleur (Ans – Liège) le 5 mars 1992. Cet ingénieur des Mines belge (AILg – Université de Liège en 1935) fut géologue à l’Union Minière du Haut Katanga (Elisabethville – Congo belge). Il a étudié le gisement de Shinkolobwe durant de longues années. Il fut ensuite vice-président du Conseil d’Administration – administrateur délégué de l’Union Minière à Bruxelles. La
derriksite appartient au groupe : derriksite, marthozite,
haynesite, piretite, guilleminite, demesmaekerite. Hormis la haynesite
(Utah) et la piretite (Shinkolobwe), toutes ces espèces se trouvent sur
le site de Musonoi (voir guilleminite). MORPHOLOGIE : Système
orthorhombique, classe pyramidale mm2. a
= 5.570 b = 19.088 Très fréquemment, la derriksite se présente en micro-cristaux de très faible taille (< 0.5 mm) (photo 1). Ces cristaux sont le plus fréquemment groupés en agrégats couvrant des surfaces de l’ordre du cm2. Ce minéral forme ainsi des croûtes microcristallines de couleur vert clair à vert malachite sombre, souvent noirs. Il arrive que quelques cristaux soient isolés. Examinés
par Cesbron et all., ces cristaux orthorhombiques sont très peu allongés
selon l’axe c et prennent l’aspect de prismes orthorhombiques
courts, aplatis suivant {100} tout en étant légèrement bombés
(Fig. 1 & photo 2)
et terminés en pointes larges de fer de
lance. Le clivage est parfait selon (010). Densité calc. = 4.72. Les
cristaux sont le plus souvent opaques mais aussi parfois translucides,
avec l’extrémité transparente. Voilà
tout ce que la littérature nous dévoile sur la morphologie de la
derriksite. Nous avons eu l’occasion d’examiner plusieurs échantillons
de qualité. La derriksite apparaît sous divers aspects plutôt désarçonnants,
dont l’un, le plus commun, représente de petites surfaces couvertes
de cristaux très petits (< 0.2 mm) agrégés comme peuvent l’être
des échantillons de petits grenats. Heureusement,
nous avons pu photographier des échantillons exceptionnels pour
illustrer nos propos. Mais il est très difficile (c’est un euphémisme)
de réaliser des mesures goniométriques sur un cristal mesurant souvent
0.2 à 0.4 mm sans destruction de l’échantillon, serti sur la gangue
de manière aléatoire et rarement isolé, le plus souvent enfoui dans
une minuscule cavité de la digénite. Deux
types de cristaux présentent un habitus caractéristique : a)
les cristaux « prismatiques » courts, aplatis, du
type analysé par Cesbron. b)
Les cristaux « pseudo-isométriques » (au sens
habitus) plus trapus, non aplatis, illustrant bien l’hémiédrie
pyramidale de la symétrie mm2 de l’espèce minérale. A.
– Type « prismatique » court – Type I.
On
discerne sur la photo
3 un
monocristal biterminé très rare (Fig.2).
On y observe la prépondérance du prisme {110}. Le pinacoïde {100} peu
appuyé (visible par réflexion modulée de l’éclairage) est
responsable d’une facette centrale d’où explose la gerbe de stries
brillantes de Cesbron. Pour fermer la partie inférieure de ce cristal,
l’examen d’autres cristaux (type II) nous a amenés à proposer le dôme
{01-1}. Cette dernière forme encore inconnue chez la derriksite, a une
grande importance dans la définition des divers habitus de ce minéral.
On observe également sur ce cristal biterminé, des « fantômes »
de croissance (photo
3 & 4). Un autre angle de vue dévoile
la proximité de ce cristal biterminé avec quelques cristaux
pseudo-isométriques de l’habitus de type II
(photo 4).
Comment ne pas être séduit par ce cristal biterminé (photo 3 & 4) qui montre le faisceau de stries très éclairé. Le fait que l’on peut discerner un double faisceau sur les parties supérieure et inférieure du cristal photographié est étonnant et pourrait faire croire à l’existence d’une macle, si l’on se souvient de la classe cristalline à laquelle appartient la derriksite qui suppose une dissimilitude des deux parties opposées du cristal, en accord avec les formes proposées dans la figure (Fig. 2A & B). Y aurait-il une macle perpendiculaire à l’axe c ? Nous n’avons pu déceler l’existence d’une telle macle sur de nombreux échantillons. Mais il se pourrait aussi que la terminaison inférieure du cristal biterminé soit aussi causée par la pyramide {12-1} pseudo-symétrique de la moitié supérieure. Malgré une nette différence d’aspect théorique, nous n’avons pu lever cette ambiguïté vu la très faible épaisseur et le placement des cristaux. Il semblerait que la 2e hypothèse soit la plus probable.
Sur l’une des vues (photo 5, monocristal cerclé), le profil supérieur d’un cristal non modifié par {100}, ni par {010} est mis en évidence (Fig. 3 B). La
photo 7 du
plus grand cristal que nous avons observé (0.9 mm) le montre associé à
un partenaire légèrement divergent alors que subsiste la trace d’une
fracture conchoïdale d’un troisième cristal perpendiculaire. Nous
avons ici une ébauche du type d’association aléatoire qui conduit à
la formation de roses de derriksite. On observera également l’hémiédrie
et l’absence de macle. D’autres facettes secondaires supplémentaires
non définies peuvent aussi modifier les cristaux de derriksite. Une
grande difficulté d’analyse provient également de la tendance très
marquée des cristaux de ce type à présenter des formes oscillatoires. L’agrégation
des cristaux de ce type produit parfois des « roses » dont les
pétales sont ces cristaux de derriksite (photo
8). B.
– Habitus pseudo-isométrique (trapu) – Type II. de la
derriksite, en ce sens qu’on y observe la partie inférieure du cristal
de derriksite. Le pinacoïde {100} montre le faisceau de stries qui permet
ainsi l’orientation du cristal. La partie supérieure reprend à notre
avis, la morphologie déterminée par Cesbron, avec la pyramide
orthorhombique {121} (qui est certainement la forme la plus fréquente) et
le pinacoïde {010} qui prend ici l’aspect pentagonal irrégulier. Nous
estimons que la partie inférieure résulterait de troncatures induites
par la pyramide orthorhombique {21-1} terminant l’allongement inférieur
du cristal selon l’axe c. Une troncature droite de deux arêtes inférieures
est réalisée par le dôme {01-1}, conférant au cristal son second
aspect typique et soulignant l’hémiédrie pyramidale mm2 de la
derriksite. Sur certains cristaux, cette dernière forme bien appuyée en
modifie nettement l’aspect.
La
photo 1 est
perpendiculaire à la face (010) (rotation de 90° du dessin
(Fig. 5). L’agrégation des cristaux de ce second type crée de petits enduits microcristallins ressemblant à de petits grenats entremêlés. Remarque :
il existe d’autres formes secondaires non déterminées qui modifient
l’aspect de la derriksite. La monotonie n’est pas de mise devant un
tel minéral, malheureusement rare et de faible taille… STRUCTURE : Le
cristal est constitué de couches d’octaèdres [Cu(O,OH)6]
parallèles à (010) et liés les uns aux autres par deux chaînes en
zigzag de Se – U – Se, parallèles à la direction de l’axe c. Les
pyramides trigonales [SeO3] et les octaèdres [UO6]
complètent la structure. La nature des diverses liaisons expliquent bien
le clivage parfait observé selon (010). BIBLIO. : (1) F.
Cesbron, R. Pierrot et T. Verbeek, Bull. Soc. Franç. Minér. Crist., 94,
534-537 (1971). (2)
Daria Ginderow et Fabien Cesbron, Acta Cryst. C39, 1605 – 1607
(1983). (3) R.
Warin, La derriksite, extrapolation morphologique, AGAB-Minibul, Vol.36,
à paraître (2003). Roger Warin. |