REPONSE
NOM : CALCITE.
ORIGINE :
Carrière de Pont-à-Nôle, Mont-sur-Marchienne (Province du
Hainaut), Belgique.
La
calcite, tout comme le quartz, la fluorine ou la pyrite, est
certainement l’un des premiers minéraux collectionnés par
l’amateur débutant. Cela provient de l’abondance de ce minéral
dans le monde, mais aussi de sa beauté intrinsèque bien qu’il
soit relativement fragile. Il possède en effet trois plans de
clivage qui conduisent à un rhomboèdre, qui est appelé par les
cristallographes : solide primitif. Chacun de ces petits
solides peut à son tour être clivé et donner un plus petit rhomboèdre,
toujours de même composition, et ainsi de suite, autant que faire
se peut...
L’Abbé
René-Just Haüy, le Père des cristallographes modernes (1743 –
1822), en déduisit des notions importantes au sujet de la « molécule
intégrante » ou brique élémentaire de la matière
cristalline. Cette théorie a été étendue à l’existence de la
« maille élémentaire » qui répétée à l’infini
dans les trois directions, reconstitue le cristal. Elle représente
le motif cristallin, c’est-à-dire l’agencement des divers
atomes entre eux. Cet arrangement se fait en respectant un certain
degré de symétrie, dépendant de la nature même des atomes.
La
calcite se prête très bien à l’apprentissage de la
cristallographie. En effet, il est facile d’orienter le cristal :
l’axe c d’élongation doit être disposé verticalement et
l’une des faces de clivage supérieures (rhomboèdre primitif)
malheureusement si souvent présente, doit être disposée face à
l’observateur. Quand on a une « dent de chien » (scalénoèdre
{21.1}), l’une des 3 arêtes supérieures les plus longues est
mise de face.
La
calcite est caractérisée par de très nombreuses formes
cristallographiques possibles, ce qui en fait le charme et la variété
des aspects (habitus). Dans la carrière de Pont-à-Nôle de
Mont-sur-Marchienne (Hainaut, B), nous avons répertorié et mesuré
52 formes cristallographiques différentes (J.M. Jonville et all.,
à paraître). Dans le système cristallin de la calcite, une forme
est caractérisée par 4 indices ou nombres entiers et généralement
petits, dont le troisième est sous-entendu. Ces indices, dits de
Miller-Bravais, sont mis entre accolades comme {21.1}. Ces nombres,
qui se prononcent « deux, un, . un » dans l’exemple de
la dent de chien, servent au calcul cristallographique. L’amateur
débutant ne doit y voir qu’une étiquette caractéristique
d’une forme cristallographique.
Le
dessin théorique du cristal naturel (Shape - Dowty) souligne les
diverses formes présentes.
Le
cristal photographié résulte ainsi de la combinaison de 5 formes
cristallographiques entre elles :
1)
{21.1} (Sd+) : un scalénoèdre positif (celui de la
dent de chien) qui détermine ici l’habitus.
2)
{18 0.1}, un rhomboèdre positif (Re+) très pentu. Dans le
cristal, les faces de ce rhomboèdre sont presque verticales.
3)
{10.1} le rhomboèdre positif primitif (Rp), qui n’apparaît
ici que par la présence de petites facettes. Les faces de cette
forme sont naturelles bien qu’elles donnent l’illusion que la
pointe du cristal est cassée.
4)
{40.1} est un rhomboèdre positif (Re+) (facette en médaillon).
5)
{41.6} un scalénoèdre positif (Sb+) qui tronque les 2 extrémités
du cristal.
Remarques :
les symboles Sd+, Re+, Sb+ seront expliqués dans l’article qui
paraîtra prochainement dans le Règne Minéral.
L’amateur
averti peut redessiner ce cristal en utilisant un programme de
calcul tel que Shape ou Faces, en adaptant les
distances au centre pour les troncatures.
Ce
cristal présente aussi une autre particularité, il est maclé.
Sur le dessin, on voit bien qu’un plan miroir réfléchit l’une
des moitiés du cristal sur l’autre. Ce plan est perpendiculaire
à l’axe d’élongation c. Ce plan de macle (une loi de macle très
fréquente chez la calcite) n’est pas un vrai plan de symétrie.
CONCLUSIONS :
1)
L’amateur débutant doit bien comprendre la signification des
mots. Ainsi la notion de forme cristalline est bien spécifique et
ne doit pas être confondue avec l’aspect du cristal (sa « forme ! »).
Ceci n’est vrai que lorsqu’une seule forme cristallographique
fermée est présente : par exemple, la dent de chien définie
par {21.1}.
Très
souvent, plusieurs formes entrent en compétition pour modifier
l’aspect du solide primitif. Si l’on considère que les 52
formes déterminées à Mont-sur-Marchienne sont les lettres
d’un alphabet, on peut imaginer le nombre quasi illimité de
combinaisons possibles de ces lettres entre elles. Il est toutefois
possible de trouver des classifications rationnelles de ces
interactions mutuelles de formes. Le cristal réel, ou mot
constitué de cette combinaison de lettres, sera donc très
variable. Pas étonnant qu’il y ait donc des collectionneurs de
toutes ces richesses naturelles.
2)
La carrière de Pont-à-Nôle à Mont-sur-Marchienne est vraiment
exceptionnelle quant au nombre de formes observées : 52 ont été
établies avec précision, alors qu’il pourrait y en avoir une
petite centaine. La carrière de Landelies pourtant si proche n’en
contient que 7 à 10. Bien des sites n’en contiennent que 2 et
cela quel que soit l’étage d’extraction.
Ah
si toutes ces facettes m’étaient contées… Ce sera fait à
l’automne dans le Règne Minéral !
Roger
Warin
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