PROUSTITE

 

Proustite – Schlema, Erzgebirge, Saxe. © R.Warin.


Voici encore un minéral à la consonance connue, ce n’est pas étonnant car ce minéral fut dédié au chimiste français Joseph Louis PROUST (1754 – 1826).
Ce savant est à l’origine de l’une des premières lois fondamentales de la chimie, la loi dite des proportions définies. Autrement dit il a souligné que les formules devaient contenir un nombre entier d’atomes et non des nombres fractionnels. Par exemple, un oxyde de fer s’écrira FeO et non Fe0,95O. 


J.L. Proust (1754 – 1826).


Proustite – Schlema, Erzgebirge, Saxe. © R.Warin.


COMPOSITION



La proustite n’est pas l’exemple le plus simple pour expliquer la loi de Proust. C’est en effet un sulfosel d’argent. Sa formule est :
Ag3AsS3
Les cations Ag+ sont neutralisés par des AsS33-. L’antimoine Sb est un élément aux propriétés semblables. L’anion correspondant est SbS33-. Cette similitude fera que l’un de ces anions pourra se substituer à l’autre et former ainsi un nouveau composé d’argent appelé la pyrargyrite. Il se forme une solution solide entre ces deux sulfosels très partielle.

Grâce à cette possibilité d’associer divers sulfures il s’est créé une grande diversité de molécules. Ainsi, l’argent, métal semi-précieux et relativement rare, possède l’un des plus grands nombres d’espèces minérales différentes, une quarantaine. Si l’on se souvient le soufre est l’un des meilleurs agents minéralisateurs de la croûte terrestre, très avide des éléments chalcophiles, on se rend compte de la richesse des possibilités. Merveilleuse Nature, si rationnelle et si fantasque ! 


Proustite – St Andreasberg, Saxe. © R.Warin. 
On y perçoit le prisme surmonté d’un rhomboèdre et modifié latéralement par un scalénoèdre pentu.


CRISTALLOGRAPHIE


La proustite est rhomboédrique mais sa symétrie est plus faible que celle de la calcite : groupe spatial = R3c avec comme paramètres de la maille :
a = 10.79 Å c = 8.69 Å Z = 6.
a : c = 1 : 0.805. 
Groupe ponctuel : 3m.
Classe ditrigonale pyramidale. Un axe ternaire et 3 plans miroirs verticaux. La partie supérieure est dissymétrique de la partie inférieure du cristal (comme la tourmaline).
Sa structure est identique à celle de la pyrargyrite, mais les teneurs en antimoine ne dépassent pas 3.6 %. Dureté : 2 – 2.5 ; densité : 5.62 (calc).



MORPHOLOGIE



Elle cristallise très bien mais ses plus beaux cristaux restent l’apanage des musées. Le prisme hexagonal est reconnu facilement par l’amateur, mais il reste relativement court. La terminaison scalénoèdrique {21.1} est fréquente (elle correspond à la forme de la dent de chien de la calcite). L’extrémité se finit souvent avec un rhomboèdre moins pentu comme {10.1} et {01.2}. Contrairement à la calcite, la proustite ne se clive pas bien et elle le fait selon {10.1}. Sa cassure est conchoïdale. 

Ses macles sont diverses, mais celle sur {10.1} est réputée fréquente. Celle sur {10.4} produit ainsi des agrégats. Il y a aussi les macles selon {00.1} et {01.2}.
Le lustre est adamantin, la teinte rouge écarlate et le trait rouge vermillon. Elle est translucide. Les croissances parallèles sont également connues.

Photo 05-proustite-schema.jpg avec la légende :
Dessin de cristaux de proustite (crédit : Dana)



GISEMENTS



Les « Argents rouges », comme on appelle ces divers sulfures, se trouvent dans des veines de dépôts d’argent dont la formation est du type « basse température ». Ces filons seront évidemment leurs sources. Proches de nous, citons Ste-Marie-aux-Mines, et à Freiberg en Saxe, aussi à St Andreasberg, Erzgebirge. Les autres mines sont nombreuses même si le minéral est rare. Citons encore le Pérou, le Chili avec Chañarcillo, le Mexique avec Batopilas.
Fraîche, la proustite est de couleur rouge intense, mais dans la Nature elle vieillit mal dans les affleurements. Elle se transforme en argent natif, en argentite et en acanthite (deux phases sulfurées d’Ag fonction de la température). Parfois il apparaît même des halogénures d’Ag. La lumière altère ces belles couleurs rouges vermillon qui deviennent progressivement ternes, noires et opaques.

Roger WARIN.